GN CONTEMPORAIN CATASTROPHE

17-18 JUILLET 2010

GITE FORESTIER DE RABIOUX - HAUTES-ALPES

C'est monté en puissance, doucement, et vous ne l'avez pas vu venir. Le contrôle des médias par les gouvernements, la corruption des gouvernements par les multinationales overfriquées, le pouvoir d'une poignée d'hommes sur les milliards qui habitent la Planète ; la caricature que vous servaient vos écrivains de SF préférés est devenue réalité.
Réalité aussi, les manifestations d'écologistes et de corps de métiers qui sont devenus émeutes sévèrement réprimées par la justice. Réalité, les affiches de propagande et les messages devant lesquels vous passez tous les jours, scandant la nécessité de se battre pour abolir réellement les privilèges ou de sauver la planète en boycottant les produits des industriels. Réalité, les campagnes obligatoires de vaccination et les quarantaines imposées par l'arrivée chaque année de nouvelles épidémies de grippe toujours plus virulentes.
Aujourd'hui, nous sommes en 2012. La crise économique est sans précédent. Le 25 février, un groupe de pirates informatiques a court-circuité les satellites permettant aux principales bourses mondiales de communiquer. Le black-out total... S'ensuivit un monstrueux krach boursier et le dérèglement total de la civilisation, malgré l'instauration de la loi martiale. Et comme si ça ne suffisait pas, une nouvelle épidémie de grippe se déclare. Mais cette fois, c'est bien pire que les précédentes...

Vous allez incarner au cours de ce week-end une personne qui fuit pour sa vie. Nous déterminerons ensemble ce qu'a vécu votre personnage avant d'en arriver à venir se planquer dans les montagnes. Ses forces, ses faiblesses. Ce qu'il a au fond de ses poches.

Si vous voulez une bonne idée de ce que vous allez subir, réingurgitez quelques bons vieux films de zombies comme la trilogie Feast, la bilogie 28 jours/semaines plus tard, Zombiland, et ajoutez-y une pincée de séries américaines perturbées comme Heroes ou The Shield. Ca aura un arrière-goût d'Avatar, mais c'est normal, c'est à cause des herbes de provence.

Pour plus de renseignements,

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Sophie RIBAIL

7, rue Capitaine de Bresson

Résidence Le Saint Coeur entrée D

05000 GAP

 

 

Nouvelle d'introduction :

Yvan crispa une main sur son cœur, comme pour l'empêcher de sortir de sa poitrine. Il courait, courait toujours, dévalant la pente herbeuse, ne quittant pas des yeux l'orée sombre de la forêt, encore un bon demi-kilomètre avant de l'atteindre...

Il ne se rappelait pas à quel moment cette dégringolade dans l'horreur avait bien pu commencer. Il y avait bien cette apparition étrange, à la fenêtre de sa cuisine, deux semaines auparavant... Les journaux avaient déliré sur ce virus qui gagnait du terrain, et les gens avaient commencé à déserter Marseille, Aix-en-Provence, Manosque... Dans sa bicoque pourrave près de Sisteron, en pleine cambrousse, on avait beau en entendre parler, ça restait quand même secondaire, un peu comme un film. C'était les citadins qui étaient concernés, pas lui. Lui, il avait ses poules, ses moutons, la gueule de travers et un formidable tas de bibelots pleins de poussière que lui avait laissé sa mère. Chaque jour suivait l'autre avec la même monotonie, alors, difficile de s'imaginer l'extérieur débarquant ici avec son lot de malheurs.
Et pourtant, l'extérieur avait bien débarqué ici.

Elle s'appelait Sylvia. Boiteuse, fringues déchirées, du sang sur la joue, les yeux ouverts sur un vide tellement immense qu'il avait peur d'y lorgner l'arrière du crâne. Mignonne, aussi. Muette.
Il lui avait ouvert sa porte, et elle était entrée, elle avait amené avec elle la ville et l'horreur. C'était pas besoin de faire des frais de conversation avec elle, elle buvait son lait, mangeait son pain, mangeait, mangeait encore. Puis ils avaient fumé des cigarettes, bu du café, et là elle avait commencé à raconter, toute sa vie, de la voix rauque de ceux qui en ont perdu l'habitude. Elle a commencé à l'école maternelle, puis a enchaîné, collège, lycée, apprentissage chez un coiffeur minable, sa première fringue de marque, son premier joint, sa première fois. En toutes autres circonstances, ça aurait pu paraître malsain, mais là il n'y voyait rien à redire. C'est comme si en parlant elle se rappelait de qui elle était, pas un animal, un humain. Puis elle lui a parlé du couvre-feu, des émeutes, de la faim venue avec les tickets de rationnement, les militaires de partout, le black-out du 25 février qui avait coupé l'ensemble des communications par satellite. La loi martiale restreignait de plus en plus les droits des gens, et la mise en quarantaine de Marseille avait coupé la retraite à ceux qui n'étaient pas d'accord. Elle avait des amis de lycée qui s'étaient fait emmener par les flics pour avoir posé des affiches de propagande écologiste.
Puis il y a eu la maladie.

Yvan, la maladie, ça l'connaît. Ça a d'abord emporté sa mère, un sale cancer de la moelle, allez essayer de soigner ça. Puis ça a pris son père. Sa maladie à lui, c'était l'alcool. Mais c'est le fusil qui a eu le dernier mot.
Et puis là-dedans, Sylvia. Les contaminés, ils lui ont pris tous les siens. Son propre frangin a essayé de la bouffer. Elle s'est enfuie par les trous dans l'isolation de son grenier, une chance que son paternel ait jamais eu la motive de refaire le toit. Yvan comprend pas trop, tout ça, les Contaminés, la loi martiale, alors la radio racontait pas des conneries, pour une fois ?

Inconsciemment, quand Sylvia s'endort sur la paillasse qui lui sert de sofa, il sort la carabine du placard, celle-là même avec laquelle son père s'est fait fleurir le cerveau, et l'huile, l'astique, la recharge, récupère des munitions et un sac de bouffe. C'est comme si c'était dans son sang. C'était normal qu'il se prépare, maintenant qu'il avait quelque chose à protéger outre lui et son chien.
Dommage que Néron ait décidé d'aller pisser à ce moment-là.

Il accélère encore sa course, il croyait pas que c'était possible, mais ses jambes se rappellent mieux que lui le temps où l'homme était une proie et non un prédateur. Il croit voir un mouvement à l'orée de la forêt, et ses yeux cherchent désespérément à donner un contour à l'espoir débile qui vient de naître en lui. C'est sûr cette fois, s'il meurt pas bouffé, c'est son cœur qui va exploser.

Lorsque Sylvia se réveille, machinalement elle prend sa douche, machinalement elle se balade à demi-nue, Yvan lui prête de vieilles fringues à lui, quand il était môme. Les paysans, ça jette rien.
Elle dédaigne ses fringues, mais elle le prend lui, et c'est comme s'il y pouvait rien faire, rien arrêter, et le voulait-il, d'ailleurs ? Ça faisait tellement longtemps qu'il avait même oublié l'odeur que ça avait, l'amour.
Puis, comme si désormais il lui appartenait, elle l'avait emmené avec elle. Il pouvait pas rester ici, de toute manière. Elle répétait ça avec obstination, et il se taisait, il y comprenait rien, il y croyait pas, mais on contredit pas la femme à laquelle on appartient si elle décide de vous sauver.
Puis ils ont vu le chien, et Yvan a compris.

Depuis, il y en a eu, des fous furieux à buter, des cavalcades à travers des étendues vides de toute cachette sûre, des survivants pleurnichards ou catatoniques, croisés dans des stations services, des supermarchés, des caves et des greniers, prostrés sur des toits, parfois même squattant des églises ou des cimetières, arguant que c'est le dernier endroit protégé par Dieu où les Contaminés pourront pas entrer. Sylvia restait jamais plus de six heures avec eux. Même l'église puait la merde.

Elle parlait, avec véhémence, avec passion, d'un seul lieu où enfin ils seraient en sécurité, elle en était sûre : ce coin paumé en pleine montagne, où sa mère l'avait emmenée quand elle était môme. Y'avait une vieille maison délabrée, mais qui tenait bon, qu'on pourrait retaper, en-dessous d'une grotte superbe où dansaient des hirondelles de roche, où l'eau venait des névés du Pic de Bure, où les vieux champs en friche depuis des décennies conservaient leur peau lisse et n'attendaient que le soc de la charrue, où parmi les herbes folles et les arbres emmêlés on pourrait découvrir asperge sauvage, orge, épeautre et fruits petits et grenus qui tiennent au ventre. Yvan la croyait à moitié, mais la voir sourire, il lui en fallait pas plus pour mettre un pied devant l'autre, encore et encore, jusque là-bas. A pattes, ça allait pas vite, mais la région était pas bien peuplée et ils s'en plaignaient pas pour une fois.

Les larmes aveuglaient presque sa vision. Il buta sur une pierre, puis roula sur lui-même jusqu'au bas du champ. Il entendait derrière lui les râles de joie des Contaminés qui se rapprochaient, leurs gueules ensanglantées , bavant de rage et de haine, en proie à une inexorable soif de vengeance et de chair. Une vague de leur odeur douceâtre submergea Yvan lorsqu'il atteignit le bas du champ, luttant pour reprendre sa respiration.

Sylvia avait décidé de prendre une douche, encore une fois. C'était jamais évident, de trouver ça, une douche libre et tranquille dans l'coin. Cette supérette dévastée lui en avait fourni l'occasion, et Yvan remplissait son sac de bouffe quand il l'entendit hurler. Putain, ils en avaient fait le tour quatre fois au moins et rien trouvé, d'où il sortait, celui-là ? Et il fit irruption dans la salle de bain, et elle était là, se tenant de ses deux mains au lavabo, face au miroir, comme si elle allait se maquiller, mais le sang coulait le long de son cou, elle hurlait sans discontinuer, fixant désespérément son reflet, mais elle espérait voir quoi là-dedans ? Que c'était une blague ? Et le môme surgit des toilettes et fonça sur lui, sanglant, boueux, puante petite merde qu'il dégomma bien proprement. Le merdeux lâcha la poignée de cheveux longs qu'il tenait dans sa main, encore attachés à un ruban de peau translucide.

Yvan se précipita vers Sylvia, mais elle l'arrêta d'un geste. Elle découvrit la longue estafilade qui amochait sa gorge fine, et les empreintes de menues incisives qui couronnaient sa clavicule. Elle s'agenouilla sur le carrelage, dos au mur, rouge sur blanc étincelant, et commença à se balancer d'avant en arrière, et ses yeux redevinrent vides comme deux grands gouffres jumeaux infranchissables, et Yvan restait là, interdit, la pétoire à la main, la gorge comme cerclée de métal, empêtré dans des sentiments qui ne portaient même pas de parole.
Elle lui demanda de la tuer. Après avoir vu tant de Contaminés, il ne pouvait pas lui refuser ça. Son âme hurlait mais son corps effectua sa besogne mécanique.

Puis il avait repris sa fuite, dans la même direction. Il ne lui restait plus rien d'autre à faire.

Yvan se raidit, dans l'herbe, attendant les griffes qui le mettraient en pièces, lorsqu'une ombre passa au-dessus de lui et les coups de feu commencèrent. Les râles de triomphe des Contaminés se muèrent en grognements de rage, et Yvan vit deux, trois, cinq ombres émerger de la forêt et décimer la bande à ses trousses. Pas un de ces êtres ne lui accorda la moindre importance. Un sanglot soudain secoua tout son corps, puis d'autres suivirent, avec les larmes, l'impression de déborder, le rugissement de son sang à ses oreilles qui couvrit même le bruit des tirs.
Une sixième ombre se détacha de la forêt.

Il la suivit des yeux sans la voir, atone, puis elle se pencha vers lui et lui tendit la main. Machinalement, il la prit, se leva, observa le massacre nécessaire pour sauver sa peau. La barbaque pourrie volait, ça aurait dû le répugner une fois de plus, mais il ne ressentit absolument rien. Il baissa les yeux sur l'être qui se tenait près de lui, et ne s'étonna ni de son apparence féminine, ni de son accoutrement bizarre semi-préhistorique, ni même des mots qu'elle prononçait et qui voulaient rien dire.
Même si ça n'avait pas de sens, ce n'était pas pire que les quinze jours qu'il venait de passer.

Il les suivit donc sous les frondaisons ténébreuses.

Mises en ambiance :

 

Écrit le 25/04/2010 par boz 
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